(sans titre)

J'aime bien regarder les annonces de la librairie ésotérique. Les stages de tantrisme ont ma préférence : on ne sait déjà pas utiliser l'imprimante en bluetooth, et certains espèrent niquer en wifi.

Outre la scandaleuse et réductrice appropriation culturelle, je ne vois absolument pas l'intérêt de jouer à ne pas se toucher.
Du corps d'un homme, je veux tout. De la petite parcelle derrière l'oreille, si fine, au dos long comme une plage où me promener. Des soupirs aux gémissements étourdissants. Le désir est cette espèce de vague d'incendie, terrassant, vertigineux. Au creux de mon ventre, il lèche mon émoi, et je m'agrippe à lui dans une urgence, avec l'espoir d'être tenue si serrée que je glisse sous cette peau adorablement différente de la mienne. J'aime l'animalité du sexe, pas dans une sauvagerie que la pornographie singe sans dentelle, mais dans l'extinction des jugements critiques, dans l'abandon lumineux et confiant. 
J'aime le sexe pour ce qu'il est, et quand il est le prolongement de sentiments tendres et doux, précieux, c'est une célébration. Être amoureuse ne me manque pas, il ne s'agit pas du tout de ça. Ce qui me manque, c'est le chahut joyeux de corps de gens qui s'aiment bien, qui s'aiment beau et doux. Il y a tant de précaution et d'amour simple dans ces instants, à tenir quelqu'un contre soi et loin du monde. J'aime la maladresse des petites timidités, les balbutiements au bout des doigts car l'émotion vive, regarder des paupières se fermer sur un feu naissant, sentir un appétit se creuser au rythme des caresses, des baisers, des rires étouffés et des petits mots étranglés, la surprise de se libérer l'un et l'autre, de ne rien s'interdire, ni la jouissance bruyante, ni les mains qui guident en cajolant, le rire encore et la tendresse toujours. C'est une magie douce et poétique, une étreinte qui n'est pas un accident ou un essai. Elle a une existence pleine et solaire, mais on ne s'en interdit pas de nouvelles éclosions, refuge infusant entre quelques saisons. Tout ça, on y pense comme on pense à une belle histoire qui compte, car c'est ce que c'est. Du sexe qui n'est pas un marchandage, un contrat, une entente pour évaluer des sentiments ou terrasser une peur de la solitude. C'est, exactement.
Je n'ai pas fait l'amour avec quelqu'un de chouette depuis longtemps. Je n'ai jamais espéré de grand amour plein de à la vie et à la mort, mais là, je voudrais simplement des heures tranquilles de mots bus lentement et un embrasement, de tout ça faire une fête et une beauté. Qu'on prenne soin l'un de l'autre contre un foyer secret, qu'on réchauffe nos mains puis se fasse du thé, repus, enveloppés, adorés.