J'ai une petite liste de rêves qui n'en sont pas. Ce sont des comptines, peut-être, des rêveries tranquilles.
Je rêve d'aller tout au bout de la Bretagne, et donc du continent. D'aller au Mont-Saint-Michel, la première expédition enfant avait été ruinée par la violence de mon père. D'aller dormir dans un endroit très vert. De voir un loup, il revient en Bretagne, a été aperçu au printemps dernier. Ça me rappelle ce matin où j'ai vu un renard. J'allais au travail. 5 heures 30, devant la déchetterie. La petite course caractéristique, la queue touffue. Il s'arrête et se retourne en m'entendant. On se regarde. Vingt mètres nous séparent. Il repart, au pas. Mon cœur se serre encore de la beauté inouïe de cet instant. Je me suis sentie comprise. Acceptée.
Je rêve de regarder un film contre une épaule, ou de lire dans un canapé pas à moi. C'est costaud, de devoir tout faire seule. Parfois, j'aimerais qu'on me fasse un endroit où me reposer, des danses sur le bras pendant que je m'endors doucement. Ce n'est pas une affaire d'amour romantique, c'est une affaire de tendresse et de repos. Les humains adultes et autonomes, seuls, il faut qu'on fasse des arrêts au stand, qu'on lève le pouce en réclamant une mi-temps. On gère des enfants, des emplois, des frigos à dégivrer, une planète en feu, une politique violente, des petites peines intimes qu'on sait à peine, on mérite des refuges. On mérite la respiration. La tendresse.
Voilà, je me promets de garder le cœur doux pour mes aimés choisis et choyés. D'être celle qui emballe des cadeaux juste comme ça et dévalise la Biocoop, de faire ce que je peux pour que penser à moi leur tienne beau.

Maintenant, je vais aller lire absolument tout ce que je trouve sur ce sacré loup breton, qui doit rejoindre le renard et la belette...