Et ce qui couvait entre les migraines et les insomnies explosa.
Dos figé bloqué crispé jusqu'à la nausée jusqu'aux larmes jusqu'aux jambes.
Lui écrire et avouer que là, dans ces jours, j'ai besoin de lui. C'est stupide, de tout faire pour envelopper et soutenir, être "la plus gentille du monde" qui prend soin et caresse, mais avoir toujours cette armure qui empêche de dire que là, là, il faut la tendresse comme un sauvetage, un endroit où être couvée. Ça fait ça, l'enfance qui se passe mal et les hommes qui détruisent. Ça fait ravaler la boue hurlante et faire comme si, mais j'ai grandi et guéri, et "Je veux bien un câlin".

Je manque de pleurer en descendant des escaliers.
Quelqu'un passe vite et je m'imagine lui demander de l'aide, son bras pour marcher plus facilement.
Je me tiens un instant à une poubelle, ne peux pas caresser un chien mignon.
Je transpire, sens la douleur jusque sous mes dents.
Le numéro de SOS Médecins, au cas où, vraiment, et mes chaussures aux pieds parce que je ne peux pas me baisser.
Je me tiens à un livre que je ne lis pas, je joue à un jeu de société avec l'enfant en me concentrant pour ne pas pleurer.
Avaler ma salive est un effort.
Je pense au gros colis demain, à la séance de natation que je vais devoir aménager, passant de l'entraînement digne d'une loutre véloce à une rééducation de labrador accidenté. Je rentre très difficilement, pleure sur le perron mais suis soulagée d'être dans mon petit endroit heureux. Nausées de la douleur, dîner malgré tout mais pas très bien, triste carotte brossée dans l'évier. Le chocolat offert par J. sauve un peu. Je lis des mots gentils. Je compte les heures. 

Et je me promets de ne plus compter que sur moi, d'arrêter de tout porter et endurer seule. Il s'agirait de prendre de la gaulthérie et de se laisser être aimée.