Bisou

Je t'écris un bisou et tu en fais bien ce que tu veux. Tu peux le poser où tu veux, dans la boîte à gants de la voiture, ton sac à malices ou tes jours sans fantaisie. Ou dans les poils du chat, mais t'as pas de chat, alors dans ta poche ou bien dans ton cou, comme tu veux, vraiment, je l'ai pris comme ça exprès, en dodu doudou. Dans la poche, c'est bien, c'est à un RonRonnement de pRoche, puis c'est un bisou fait le nez frais, alors...

Bien sûr, il est échangeable.

Bagarre

Petite, je saignais souvent du nez. Une timidité, un ballon dans le visage, l'eau chlorée ou un matin brouillon, et je sentais un filet tiède éclore et tomber jusqu'à mes lèvres, mon tee-shirt et mon embarras. Je ceuillais mon sang de mes mains, appuyais mes doigts contre mes narines, très fort, juste sous l'os. Je le veillais en tenant mon menton dressé au ciel, sentais la chaleur dévaler ma gorge et révolter mon estomac. Je pissais le sang et ce n'était rien, juste un échantillon de la violence qui ne se dit pas. 
Déjà je saignais sans combat.

(sans titre)

Il y a le vieux monsieur de l'immeuble d'en face, figé avec son chien devant les travaux de la voirie. Je crois que c'est parce que dans leur enfance il n'y avait pas de pelleteuse que les petits vieux endossent désormais le rôle d'observateurs bien volontairement.

Et moi je les vois.
Les immeubles qui se montent en un clin d'oeil de passants paresseux, de promeneurs négligents.
Les routes creusées comme des milliers de tombeaux, mystérieux tuyaux et passages secrets que je me rêve.
De l'autre côté des grilles, il y en a toujours un. Il a une casquette ou un pantalon en velours, déjà le pain et parfois un chien.
Un petit vieux qui regarde cette grande affaire, les ouvriers.
A 16 heures 30, il ne sera pas là mais il y aura son homologue en poussette, qui mange des madeleines et regarde avec la même application l'élévation de l'urbain jusqu'au ciel, Icare en tenue de chantier dans la grue jaune.

(sans titre)

Ce qui tord le ventre c'est l'espace entre deux corps,
Des mains qui dansent au dos de l'hiver argent
Puis essorent les nuages,
Écouter un cœur comme on écoute à travers une porte,
Sentir un cou,
L'embrasser comme un bras de mer,
Je fais le gros dos,
Comme au fin fond d'un novembre qui mange la lumière
J'ai mal à un endroit qui n'existe pas.
Je fais des poèmes comme des cailloux.
Sur un petit chemin, contre l'horizon
Je bande ma cheville.

Chut(e)

Entre la chute et le silence il n'y a qu'une march(e), cette lettr(e), le facteur n'est pas passé, il ne passera jamais,
Lundi 
Mardi
Mercredi 
Jeudi
Vendredi 
Samedi 
Dimanche, latence.

Penn ar bed ha eon.

"Il y a trois sortes d'hommes : les Vivants, les Morts, et ceux qui vont sur la mer"

Aristote